Hommage à Papus, 25 octobre 2020

Texte de l'hommage prononcé par Emilio Lorenzo, président du Cercle des Amis de Papus, sur la tombe de Gérard Encausse1, dit Papus, le dimanche 25 octobre 2020.

Hommage à Papus

Mes amis, fidèles admirateurs de Papus, chers Frères, chères Sœurs de toutes obédiences ou organisations initiatiques, nous sommes ici aujourd’hui, pour rendre hommage à Papus et à son fils, Philippe Encausse - Jean.

Je cite ce qu'un ami ici présent écrivait, il y a quelques jours : « En ces temps perturbés, en ces temps d’interdiction de rassemblements de personnes, en ces temps favorisant la séparation et la division, il est essentiel de mettre en œuvre toutes les forces de rassemblement des âmes disponibles. »

Je crois qu’on ne pouvait mieux décrire l’état d’esprit qui nous anime, nous tous, devant la présence, invisible mais réelle, de ceux qui ne sont plus physiquement, mais existent toujours, lumineux et vivants. Ici.

Philippe nous réunissait ici pour dire « merci » à son père. Et pour être ensemble dans la joie, dans un moment de gratitude envers celui qui avait consolé tant de cœurs blessés, tant de chagrins qui paraissaient insurmontables, lui qui donna de sa vie sur le front de la guerre 14-18. Philippe avait suivi son exemple, en devenant correspondant de guerre lors de la dernière en 39-45. A l'occasion de réunions amicales, il nous racontait cette guerre-là : l’inimitié parmi les hommes, leur violence, le quotidien des petites gens qui ne comprenaient pas comment on pouvait s’entretuer, ni pourquoi la vie devait-elle être comme cela.

Papus mettait à portée de ses lecteurs l’idée de la réincarnation, le spiritisme, le pardon, l’appel à la paix, qui resta lettre morte parce que l’esprit des dirigeants n’était pas celui qu’il aurait dû être et, plus tard, la voie de la Bonté que son dernier Maître spirituel, Philippe de Lyon lui avait appris. Tout cela fut l’œuvre de ce grand homme qui repose ici. Démobilisé, malade, il dû reprendre ses activités de médecin. Il devait monter des étages pour aller visiter les soldats blessés convalescents, avant qu'ils soient rappelés sur le front. Médecin, ce que des patients lui payaient, il le donnait à ceux qui ne pouvaient pas payer, alors que chez lui, la vie avec sa femme Jeanne et son fils Philippe n’était guère facile. Mort en 1916, il ne put voir la fin de la guerre. Mais son œuvre restait, vivante.

Philippe fut un fils qui consacra sa vie à faire connaître l’œuvre de son père. Jeanne avait beaucoup de mal à donner à leur fils Philippe la possibilité de devenir médecin, comme son père. Ce fut le gendre de Maître Philippe de Lyon, le docteur Lalande, connu sur le nomen de Marc Haven, qui le prit sous son aile et finança ses études. Il avait été, lui aussi, un fidèle de Maître Philippe. A cette époque, l’amitié qui unit ceux qui ont l’amour du Bon, du Vrai et du Beau était partagée au sein des amis de Papus.

Sédir son secrétaire, dit à son inhumation, le 28 octobre 2016 : « Il me semble juste qu’au couronnement de cette carrière si remplie, une voix dise tout haut ce que tant de reconnaissances murmurent tout bas. L’érudit, le philosophe aux splendides intuitions, le propagandiste puissant, le conférencier applaudi, le voyant, le thérapeute habile, tous ces aspects admirables s’unissent en la personne de cet homme de bien, dont la dépouille, dès maintenant vénérable, est confiée aujourd’hui à notre Mère commune. Imitons cet initiateur qui voulut n’être qu’un Ami pour nous et qui fut assez fort pour cacher ses douleurs et ses misères sous un perpétuel sourire »2.

Comme son Maître spirituel, Papus fut un Ami dans tout le sens du terme pour de nombreuses personnes qui cherchaient une bonne âme sur qui reposer leur tête. Il y a aujourd’hui, autour de Papus et de Philippe, des lecteurs qui ont trouvé dans leurs ouvrages soit des explications à l’apparente absurdité de la vie, soit une consolation lors de la perte d’un être cher, soit la force pour continuer d’affronter les difficultés et les problèmes de l’existence. Car, sans la foi en un Être suprême, aussi juste que bienveillant, de telles épreuves auraient pu être prises comme une punition inexplicable. Papus leur racontait la loi de cause à effet, la grâce et le pouvoir d’acceptation de la Vierge, l’espoir de la réincarnation, le sacrifice du Fils.

Aujourd’hui, présente avec nous tous, il y a la famille d’un jeune homme qui quitta la vie après avoir été mal entouré. Ses parents n’arrivaient pas à accepter de ne plus voir le fils tant aimé. Ils demandèrent à Philippe s’il pouvait les aider à comprendre. Et notre bon Philippe sut parler à leur cœur, et ils acceptèrent que ce n’est pas parce que nos yeux ne les voient plus que les âmes de nos aimés n’existent pas, là-haut, nous attendant. Et la vie leur devint davantage supportable. Depuis, chaque année ils nous rejoignent, Amis parmi d’autres Amis. Lorsque leur santé le permettait, mari et femme venaient entretenir cette tombe, et en même temps remercier le père et le fils. Tous les ans, leur fille bien-aimée nous honore de sa présence. Merci.

Nos amis membres de l’Ordre Martiniste belge se sont excusés parce qu’il leur est interdit de venir en France. Avec eux, des membres de la Société Théosophique et d’autres Martinistes. Merci aussi aux nombreuses organisations initiatiques qui témoignent de leur attachement à Papus. Des Groupements initiatiques divers sont aussi présents ou représentés aujourd’hui. Tous ces Amis sont les bienvenus. Ils viennent en Paix, ils repartent en Paix.

Cette Journée Papus est placée sous le signe de la Paix. Elle doit régner, car la paix est la base de l'unité qui se reflète dans la diversité de nos différences qu'elles soient sociales ou initiatiques. Cette unité fondamentale : l’unité en esprit, est constante, toujours la même. C’est le Soi cosmique qui réside dans chacun de nous, qui nous relie ensemble. Vivons cette Unité dans l’amitié. Ayons la profonde conviction que la Paix est notre nature essentielle et que nous avançons sur des chemins qui sont des sentiers de Paix.

Nous devrions œuvrer pour la paix du cœur, totale et authentique. Au lieu de nous centrer sur notre petit moi, centrons-nous sur la Divinité. Le soleil illumine toutes les créatures, indépendamment de leur origine et possessions, de leur intelligence ou habiletés.

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Depuis mon départ de la fonction de Grand Maître de l’Ordre Martiniste, j’ai continué de conduire cette Commémoration. C'est Philippe Encausse qui m’avait demandé d’être à ses côtés, comme aujourd'hui, puis de continuer à la diriger lorsqu'il ne serait plus physiquement présent. J'espère le faire comme il le faisait, c’est-à-dire, dans la mesure de mes possibilités, avec des actes en accord avec des paroles porteuses d’union et de Paix. Le bonheur d’être ensemble en résulte. Cette cérémonie n’est la propriété d’aucune assemblée où l'on discute, où l'on vote, où l'on distribue des pouvoirs et où l'on finit par compter. Non. Ici les personnalités s’effacent. On est unis en esprit, sur d’autres plans. Et cette cérémonie en est la confirmation.

Après que j’aie quitté ma fonction de Grand Maître de l’Ordre Martiniste en 2016, il a été publié et diffusé dans Le Flambeau N° 115 - le bulletin de l’Ordre Martiniste - en 2017 : « à terme l’Ordre Martiniste prendra la relève et assurera la totalité de l’organisation des Journées Papus. » Quel « terme » ? Ce sont là des vœux pieux… Il n’y a pas de « terme » seulement une continuité. Elle viendra en son temps. Parce que l'âge avance, j'ai fondé avec des Amis de Papus et de Philippe, son fils, Le Cercle des Amis de Papus. Ce cercle a un site, visible sur internet, et continuera d’assurer ce rendez-vous annuel, tel que Philippe l’avait mis sur pied pour honorer son père.  Que l’Ordre Martiniste soit présent, cela est évident. Deux Loges maçonniques ont déjà été présentes, invitées par Philippe, et de nombreux Amis sont aujourd’hui ici. L'esprit d’Unité et de Paix qui règne en ce jour de commémoration n’arrivera pas à « terme », tout comme l’Amour n’a pas de limite.

Dans cette époque de confusion, est né le Cercle des Amis de Papus, comme les Amis de Saint-Yves, comme les Amis de Péladan, de Balzac… et tant d’autres. Ainsi, nous restons fidèles à Philippe Encausse, qui ne venait pas en tant que Grand Maître de l’Ordre Martiniste ni comme Franc-Maçon, mais comme continuateur de la vie et l’œuvre de son père, une vie d’amour et de silence, de don de soi, de Paix dans le cœur et Paix dans les actes. Surtout de Paix.

Nous marchions derrière Philippe sans aucune étiquette. Il nous avait demandé, à Maria et à moi-même, de continuer de le faire parce que sa cataracte, plus son double glaucome, plus son diabète, l’empêchaient de continuer. Il ne l’avait pas demandé à Emilio en tant que Grand Maître de l’Ordre Martiniste ni en tant que Franc-Maçon, ni à Maria en tant que Martiniste. Nous étions ses amis. C’est tout. Comme cela l’a été toujours pour nous. Personne ne m’a entendu dire que l’Ordre Martiniste organise cette cérémonie, ni ici, ni ailleurs. Cette cérémonie regroupe des Amis de Papus. Parmi eux, il y a Le Cercle Les Amis de Papus.

Au Père Lachaise, le 25 octobre 2020.

Emilio LORENZO

Nous aurons aussi une pensée pour Michel Léger, qui dirigea la revue L’Initiation longtemps et aussi pour Yves-Fred Boisset, rédacteur en chef de la même revue. Il est dans la lumière sans fin. Si j’oublie de citer quelques-uns de nos amis disparus, je suis sûr qu’ils me le pardonneront.

Tout à l’heure nous prierons, tous ensemble, en silence, selon nos croyances. Imaginons nos mains entrelacées. Pour des raisons sanitaires, la main droite sur le cœur. Notre monde en a bien besoin actuellement. Le don de la Prière n’appartient à personne. Ses bienfaits se répandent sur nous tous, sans distinction aucune.

Notes

  1. Pour trouver la tombe de Papus au Père Lachaise : descendre au métro Gambetta et entrer par la porte Gambetta (avenue du Père Lachaise). Une fois la porte franchie tourner à gauche et suivre la grande allée. A l'intersection des 89ème et 93ème divisions tourner à droite et remonter l'allée centrale en comptant 32 tombes (à main gauche). Passer entre la 32ème tombe (famille Aubert) et la 33ème (famille Beauvais), suivre la petite allée et l'on trouvera la tombe de Papus, à main droite, à la 38ème tombe.
  2. Extrait de l'allocution de Sédir du 28 octobre 1916 sur la tombe de Gérard Encausse, dit Papus.