Hommage à Papus, 21 octobre 2018

Texte de l'hommage prononcé par Antonin G. sur la tombe de Gérard Encausse1, dit Papus, le dimanche 21 octobre 2018.

Hommage à Papus

Ma rencontre avec Papus

J’ai eu la chance de rencontrer très tôt celui qui allait rapidement devenir l’un de mes « guides spirituels » : alors que j’étais adolescent, j’ai découvert dans la bibliothèque de mon père un ouvrage de Papus. J’avais une quinzaine d’années, et cette lecture a littéralement changé ma vie. Mes premiers pas dans la spiritualité furent ainsi teintés d’occultisme, d’ésotérisme et de kabbale.

Plus de vingt-cinq ans se sont écoulés depuis mes premières lectures et je peux aujourd’hui me retourner sur le chemin que j’ai parcouru. Un chemin que j’ai pu parcourir grâce à Papus.

La voie intellectuelle et la voie du cœur

Comme certains d’entre vous, j’ai d’abord arpenté ce que Papus appelle « la voie intellectuelle », cette première porte qui permet de s’ouvrir à un monde nouveau, un monde magique. Je me suis imprégné des grands auteurs, j’ai dessiné des schémas et synthétisé des théories. J’ai rempli mon centre intellectuel de nombreux textes et images. Mais un jour je me suis rendu compte que cela ne nourrissait qu’une partie de mon être, que c’était un puits sans fond, et qu’il me fallait aller plus loin.

Alors, suivant en cela le même chemin que Papus, je me suis progressivement tourné vers le mysticisme et le Christ, notamment grâce à celui que Papus appelait son « Maître Spirituel », Philippe de Lyon. Vous êtes nombreux ici à le connaître, car en croisant la route de Papus on finit par croiser celle de Monsieur Philippe. Lorsque j’ai préparé cette allocution, une scène rapportée par Papus a effleuré mon esprit. Elle est extraite du Traité Élémentaire d'Occultisme, et relate ce qu’il s’est passé lors d’une séance de Monsieur Philippe, à Lyon :

« J’étais là, avec deux autres médecins, quand une maman de vingt à vingt-deux ans est arrivée, portant dans ses bras un petit enfant de cinq ans, la tête ballante et les yeux vitreux. (…) Nous sommes trois médecins qui l’examinons et nous découvrons un cas de méningite tuberculeuse très prononcée. (…) Il faut que je vous dise, maintenant, comment Philippe opérait. Il y avait toujours là près de deux cents personnes. Philippe n’était pas poseur du tout. D’un caractère bon enfant, il faisait toujours rire les malades. Alors, devant tout le monde, il dit en voyant l’enfant que nous avions examiné : "On peut guérir cet enfant. Voulez-vous vous engager tous à ne pas dire de mal des absents pendant trois mois ?" Tout le monde bondit et répondit que ce n’est pas possible. En marchandant, on est arrivé à deux heures. Moi, je n’ai jamais pu rester deux heures sans dire de mal des absents ! Eh bien ! Philippe a dit : "C’est entendu ! Vous allez essayer de ne pas dire de mal des autres durant deux heures". L’enfant était dans une pièce à côté. Au bout des deux heures, je suis allé le chercher. Je l’ai pris par la main et il a fait avec moi le tour de la salle ; il était guéri. »

Être utile à tous, ne nuire à personne

Dans son ouvrage « Le Livre de la Chance » Papus a résumé les principaux enseignements de Monsieur Philippe :

  • « Faire ce qui coûte avant ce qui plaît.
  • Vivre le présent et ne pas douter de l’assistance du Ciel pour l’avenir.
  • Ne pas juger les autres et ne pas dire du mal des absents.
  • Ne pas se croire meilleur que d’autres. L’occasion seule a souvent manqué pour que nous fassions comme eux.
  • Empêcher autant que possible qu’on dise devant vous du mal d’un absent.
  • Partager avec ceux qui en ont besoin son aide morale, son temps et son superflu, sans espoir de retour.
  • Pardonner à ses ennemis et ne jamais attaquer le premier devant la justice, même si l’on croit avoir raison. »2.

Ces principes sont simples, et pourtant il est difficile de les appliquer au quotidien. Mon grand-père, André (je ne l’ai pas connu) avait une devise. Cette devise – empruntée à Saint Pierre Fourier – était « Être utile à tous, ne nuire à personne ». Je trouve qu’elle résume bien l’ensemble de ces principes.

Être utile à tous, ne nuire à personne. Il y a là du travail pour toute une vie. Il y a même du travail pour plusieurs vies. Mais nous pouvons commencer dès aujourd’hui. Inspirons-nous des enseignements de Monsieur Philippe et engageons-nous dès maintenant à ne pas dire du mal de notre prochain pendant trois mois. Trois mois ? Vous allez bondir et me répondre que ça n’est pas possible. Alors comme pour Papus et ceux qui assistèrent à la séance de Monsieur Philippe, il y a plus d’un siècle maintenant, et en leur mémoire, partons sur deux heures.

Deux heures, c’est le temps de notre déjeuner dominical. Et au-delà de tenter de nous y tenir sur dans nos paroles, tentons de nous y tenir également dans nos pensées et dans nos cœurs.

Transmettre

Papus nous a ouvert un chemin, et nous sommes nombreux à marcher dans ses pas. A nous de nous montrer digne de notre filiation avec lui, et je ne parle pas ici d’une filiation intellectuelle, ou d’une filiation initiatique, mais d’une filiation cardiaque. Une filiation non seulement avec Papus, l’initié, mais aussi avec Gérard Encausse, l’homme, celui qui nous a ouvert un chemin, un chemin que nous pouvons parcourir plus facilement grâce à lui aujourd’hui.

Le 28 octobre 1916, Sédir prit la parole, ici-même, trois jours après le décès de Papus. Sédir, à l’instar de Papus, a porté toute sa vie les enseignements de Monsieur Philippe. L’un des fidèles compagnons de route de Sédir, Émile Besson, a appelé chacun d’entre nous à porter ces enseignements et ces principes : « Il devient nécessaire de faire appel à la collaboration de tous ceux qui vivent de notre idéal, mais qui peut-être ignorent qu’il est en leur pouvoir – et pourrai-je ajouter : de leur devoir – de travailler à la diffusion de cette lumière dont notre humanité ne peut être privée sans voir tarir une des sources de sa vie spirituelle. Le champ est vaste et nous avons besoin de beaucoup d’ouvriers… »3.

Mon fils, Samuel, est avec moi aujourd’hui. Il sait que le métier de son papa consiste à parler en public. C’est la première fois qu’il me voit et m’entend parler devant d’autres personnes.

Je ne remercierai jamais assez Emilio de m’avoir fait l’honneur de prendre la parole aujourd’hui, l’année de mes 42 ans, devant mon fils. Ce n’est ni hasard, ni une coïncidence. Car il n’y pas de hasard, ni de coïncidences. Comme Papus, je l’affirme : le hasard n’existe pas.

Merci Emilio,
Merci Papus.

Amen.

Antonin G.

Notes

  1. Pour trouver la tombe de Papus au Père Lachaise : descendre au métro Gambetta et entrer par la porte Gambetta (avenue du Père Lachaise). Une fois la porte franchie tourner à gauche et suivre la grande allée. A l'intersection des 89ème et 93ème divisions tourner à droite et remonter l'allée centrale en comptant 32 tombes (à main gauche). Passer entre la 32ème tombe (famille Aubert) et la 33ème (famille Beauvais), suivre la petite allée et l'on trouvera la tombe de Papus, à main droite, à la 38ème tombe.
  2. PAPUS, Le Livre de la chance, Librairie des publications populaires, 1908, pages 135 et 136 [Télécharger - Source : Gallica]
  3. Émile Besson, Allocution prononcée lors de la 1ère Assemblée Générale des Amitiés Spirituelles, 19 septembre 1920.